Danser avec nos douleurs collectives

 

Chaque nouveau mois porte l’espoir d’une accalmie, mais elle se fait attendre.

 

Pour retourner au travail, j’ai acheté des masques de #moutondugouvernementeur sur le site Doctorak. Parmi les brillantes blagues, ma préférée est celle-ci, qui fait l’éloge de “l’époque où il ne se passait jamais rien“. Des brins d’ironie et de doux (les mots, comme le textile). Plus j’y pense et plus cette boutade, aussi amusante qu’elle soit, encourage une illusion un peu bête. Quand, où, pour qui est-ce qu’il ne se passait jamais rien ?

 

Vous me direz : « Tu saisis finalement le deuxième niveau de la rigolade ! »

 

Tant mieux pour mon sens de l’humour, mais j’espère que j’arrêterai de supposer qu’il ne se passe jamais rien.

 

Je nous souhaite de continuer (ou de commencer) à écouter, à croire les voix qui clament l’amorce d’un processus de guérison salutaire. La honte collective que révèlent ces processus de dénonciation (BLM, Dis son nom, pour ne nommer que ceux-ci) de l’omniprésente violence raciale et/ou sexuelle, imbriquée dans nos quotidiens à tellement de niveaux, m’apparaît essentielle. Peu importe le rôle que l’on désire s’attribuer dans cette hécatombe, plutôt que de chercher à s’exempter de tout soupçon, tenons pour acquis que cette honte nous concerne. Nous avons tous le potentiel de confronter la toxicité que l’on transmet aux autres.

 

La playlist de ce mois-ci c’est un appel aux plaisirs d’un désir partagé. Cette égalité ne se réalise pas sans son lot de hargne, d’affirmations puissantes et d’amertume d’une douceur disparue.

 

Comment mieux entamer le mois de juillet qu’avec Rosie Valland et sa reprise de Mylène Farmer ? Valland retient de Farmer une interprétation vocale délicate avec un lustre dramatique rehaussé par des textures instrumentales électroniques minimalistes. Une pièce qui m’hypnotise, me chagrine, puis me donne le goût de danser.

 

Artiste ou groupe mystère sur les interwebs, Unown mélange avec une efficacité impressionnante musique de jeu vidéo, rock progressif et funk. Est-ce que ce serait une version remaniée de la chanson thème de Ghostbusters à la fin de Try ? Hommage ou plagiat, c’est diablement entraînant.

 

Un bon tube de R’n’B peut transformer n’importe quel appartement en plancher de danse sulfureux. Si en plus les deux voix qui animent la pièce sont celles de Teyana Taylor et Erykah Badu, le boogie est assuré. Chaque phrase de Taylor est une vague langoureuse que Badu vient surfer avec un timbre un peu nasillard pour raconter les difficultés de naviguer les limites entre l’amitié et l’amour.

 

Surdoué, surdoué, surdoué. Le Britannique Jacob Collier est capable de tout faire, et je n’exagère pas. Son amour profond des mélodies pop couplé à une virtuosité pure donne à sa musique une teinte intemporelle et, j’oserais dire, unique. Il invite l’ancienne Diva adolescente Jojo dans la douce mélodie pimpante It don’t matter.

 

J’ai découvert le groupe du Nunavut The Jerry Cans dans la playlist dont s’occupe Elisapie Isaac : Indigenous. À la première écoute, les notes de violon celtique de SOS peuvent apparaître un peu mélodramatiques, mais finalement elles annoncent une pièce épique. Un rock dont la puissance est renouvelée par les chants de gorge.

 

En vous embrassant (si vous le voulez bien) à distance !

 

-Dj Fromage-

C’est en écoutant la playlist de DJ Fromage que Gabriel Paquet (Alias @c_batard ) a créé cette pochette. En partant de son gros coup de coeur pour Hazy Feelings de Sébastien Tellier, Gabriel choisit une palette de couleur 90’s. Il s’approprie ainsi le visuel informatique de ces années par des formes en bas-relief comme celles que Photoshop génère par algorithme. En suivant l’intention de DJ Fromage, Gabriel décide de mettre en scène deux personnages solidaires qui, dans l’amitié, arrivent à éteindre la flamme qui s’en prend à une fleur. Soyons honnêtes et dans l’action, mais restons doux et tendres en 2020!

 

Dj Fromage, aussi connu par l’alias “Julien St-Georges Tremblay”, est candidat à la maîtrise en histoire de l’art à l’Université Laval. Son mémoire porte sur l’interrelation entre l’art infiltrant et le territoire dans l’histoire du centre d’essai en art actuel du 3e impérial à Granby. Depuis 2013, il travaille comme médiateur culturel pour le MNBAQ, le Symposium d’art contemporain de Baie-St-Paul, le Mois Multi et plusieurs autres. À titre d’auteur, il écrit notamment pour les revues québécoises : Inter –art actuel, Ciel Variable et Vie des Arts. Il est également un critique musical pour les médias numériques Le Canal Auditif et Feu à Volonté.

 

Publié le 28 juillet 2020

 

Agenda de la semaine

À l'est de vos empires vous prépare une sélection hebdomadaire d'activités culturelles à faire à Québec.