Comment absorber le doré lumineux de l’automne, tout doux en fin d’après-midi, mais d’une certaine brutalité vers 13 h ? Les rayons commencent à craquer, à se refroidir, tranquillement jusqu’à la grisaille. C’est un plaisir annuel, dans mon cas, de vivre cette transition faite de contrastes, d’accueillir l’effervescence culturelle, malgré la torpeur des heures qui s’échappent pour aller hiberner.
Difficile d’apprécier cette saison où les polarités s’affirment cette année. L’inquiétude printanière est toujours là. La suffocation culturelle du gouvernement Legault est d’une violence paralysante. Le quotidien nous échappe dans un brouillard d’incertitudes.
Pandémie ou non, l’abus de pouvoir, l’injustice flagrante nous assaillent. Je suis agréablement étonné de voir à quel point les réseaux sociaux nous aident à attiser une colère nécessaire tout en offrant des plateformes décomplexées et informatives qui permettent d’agir.
À travers les moments houleux passés et à venir, je nous souhaite de gronder avec force.
Lorsque vous aurez besoin d’une pause de la réalité excessive, j’espère que cette rétrospective musicale de septembre vous aidera un peu.
Bisous à distance (si vous le voulez bien)
Pour lancer la sélection musicale, mon groupe fétiche du cégep, cette bande de Baltimore, Animal Collective. Récemment AC a lancé un EP parfait pour transformer la grisaille en expérience sensorielle intense. Bien qu’il soit excellent, j’ai préféré commencer avec la chanson What Would I Want, Sky ?, qui vous aidera à faire durer les nuages de fin de journée.
Un peu plus loin, vous tomberez sur l’inclassable Beatrice Dillon. En direct de Londres, elle propose de la musique électronique d’une inventivité qui charme, malgré l’ambition de ses compositions chargées. Elle joue avec des rythmes complexes qui ne se laissent pas saisir facilement. Dans Workaround 2, elle intègre les sons riches du saxophone à des moments clés de la pièce pour accompagner la voix humaine synthétisée.
Après les basses explosives du Montréalais Maky Lavender (People still talking) et du Belge Damso (D’JA ROULÉ), vous serez en présence d’une chanson qui me fait regretter instantanément les dancefloors. Megan Thee Stallion prouve (encore) que sa voix dynamise la sexualité féminine dans l’univers du pop-rap américain. La Texane glisse avec plaisir sur l’ambiance disco-funk des gentils de Brooklyn, Phony ppl. Reste à trouver un moyen distancié pour ceux.celles qui désirent continuer à Fkn around.
Ce n’est pas compliqué, la dernière offrande de Lianne La Havas a des airs d’album de l’année. Encore un album concept sur le cycle de vie d’une relation amoureuse, vous me direz ? Oui il y en a (beaucoup) d’autres, mais on les oublie dès les premières minutes des 52 que forment l’album. Depuis juillet, la Britannique est omniprésente chez moi, et Seven Times est un moment spécial à chaque fois. Elle arrive à faire du Soul avec une spontanéité parfaite pour ses compositions bien ficelées à des textes sensibles.
Dans notre tale intarissable de talents Keb, je suis retombé sur l’excellente galette de Bon Enfant. Difficile de ne pas se croire dans la comédie musicale de sa propre vie en entendant les guitares solennelles et le piano clair sur Aujourd’hui. La voix chevrotante de Daphnée Brisette est en funambule sur la ligne de l’horizon du quotidien. Elle chante avec désinvolture un texte mêlant l’espoir au désabusement avec une douce amertume. Il ne faut pas oublier la nouveauté toute fraîche qui sort du Pantoum, Baba, que le duo Oblique nous offre. Une pièce rock sensuelle qui permet de planer avec aisance au-dessus de l’armée de randonneurs qui veulent débusquer « les couleurs » avec leur gourde remplie de latté orange.
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Dj Fromage, aussi connu par l’alias “Julien St-Georges Tremblay”, est candidat à la maîtrise en histoire de l’art à l’Université Laval. Son mémoire porte sur l’interrelation entre l’art infiltrant et le territoire dans l’histoire du centre d’essai en art actuel du 3e impérial à Granby. Depuis 2013, il travaille comme médiateur culturel pour le MNBAQ, le Symposium d’art contemporain de Baie-St-Paul, le Mois Multi et plusieurs autres. À titre d’auteur, il écrit notamment pour les revues québécoises : Inter –art actuel, Ciel Variable et Vie des Arts. Il est également un critique musical pour les médias numériques Le Canal Auditif et Feu à Volonté.
Avec le changement des saisons vient le changement des collaborations artistiques! Pour les rétrospectives musicales de l’automne 2020, À l’est a le plaisir de collaborer avec l’artiste Éloïse Foulon. Elle accompagnera chacune des playlists mensuelles d’une nouvelle proposition visuelle.
Détentrice d’une maîtrise en arts visuels de l’Université Laval et du diplôme national d’arts plastiques de l’École supérieure d’arts et de design de Toulon, Éloïse Foulon vit et travaille à Québec. Ses oeuvres ont fait l’objet d’expositions individuelles et collectives au Roulement à billes, aux Ateliers du Réacteur, à la galerie Art Mûr et à l’ancienne École des beaux-arts de Montréal, entre autres. Elle participe à l’édition 2020 de la FAC de Saint-Lambert.
Dans les dessins et les tableaux d’Éloïse Foulon, l’espace de l’image est complexifié par l’intégration de formes colorées en aplats et superposées de lignes ou de grilles qui ouvrent à un espace hors-tableau. Les ambiguïtés des signes dirigent vers une déconstruction de notre rapport aux objets.
Publié le 30 septembre 2020
À l'est de vos empires vous prépare une sélection hebdomadaire d'activités culturelles à faire à Québec.